Haydn, compositeur... majeur
En écoutant l’op.64 no 2
Joseph Haydn a peu écrit dans le mode mineur. Si nous comptons bien: 6 sonates pour clavier sur 62, 10 quatuors sur une septantaine, 11 symphonies sur 104, le reste de l’œuvre à l’avenant.
Le mode mineur évoque la tristesse, la nostalgie, le rêve embrumé. Il a pourtant d’autres couleurs. Il est très présent dans les danses populaires les plus rapides et les plus entraînantes (tarentelles, branles,…) d’Italie, d’Auvergne et d’ailleurs. Il est presque de règle dans la musique hongroise, peut-être empreinte il est vrai d’une certaine mélancolie, mais combien vigoureuse! Il s’épanouit avec grâce dans maintes pièces baroques. Il fait chanter des arias de Bach dans la plus profonde sérénité. N’empêche, il est le plus souvent, dès le milieu du XVIIIe siècle et plus encore, bien sûr, chez les romantiques, de teinte sombre et d’accent attristé.
Haydn, lui, aime la clarté du mode majeur, sa joie, son caractère affirmatif. Même dans ses œuvres annoncées et entamées en mineur, il bifurque souvent vers le majeur, comme attiré par la lumière. Le quatuor à cordes en si mineur op. 64 no 2, superbe comme des dizaines d’autres, offre à son second mouvement le chant apaisé d’un adagio en majeur, un trio du menuet en majeur aussi; et même le final, pourtant a l’ungarese, se termine par le refrain transposé en un éclatant majeur!
On appelle parfois le maître d’Eisenstadt «le bon papa Haydn» et ses admirateurs n’apprécient guère cette formule, qui peut paraître réductrice. Il ne faut certes pas diminuer ce créateur immense, un des plus grands compositeurs de tous les temps, et des plus inventifs puisqu’on lui doit d’avoir donné sa forme classique et ses lettres de noblesse au quatuor à cordes, en le portant rapidement à sa perfection. Mais voyons aussi ce qu’il y a d’aimable dans l’évocation du «bon papa»: la reconnaissance d’une réelle bonhomie, au sens originel et fort, celui d’un homme bon. Un homme qui voit, ressent et magnifie le bon côté des choses et des œuvres de l’esprit. Certains reprochent parfois à sa musique, dite pure parce qu’elle joue avec les sons comme nulle autre, de manquer de sentiment. S’il s’agit de sentiments moroses ou languides, sans doute. Mais le plaisir du jeu, la joie, le bonheur sont aussi des sentiments!
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Le manifeste de la solitude – Editorial, Olivier Delacrétaz
- Retour au réel – Jacques Perrin
- Conversion – Rédaction
- Un monde sadien – Jean-Blaise Rochat
- La présidence du Conseil d’Etat – Jean-François Cavin
- L’initiative «Davantage de logements abordables» manque sa cible – Olivier Klunge
- Le CO2 et le changement climatique – Jean-François Pasche
- Le «bon docteur Messerli» – Jean-François Cavin
- Occident express 45 – David Laufer
- Idées de cadeaux – Jean-François Pasche
- Vivre ensemble, c’est bon pour les autres – Le Coin du Ronchon