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Pour que le Mormont vive, non à l’initiative!

Pierre-Gabriel Bieri
La Nation n° 2287 5 septembre 2025

La colline du Mormont, sur les communes d’Eclépens et de La Sarraz, est à la fois un lieu de villégiature, splendide et sauvage, et une source indispensable de matériaux de construction, avec sa gravière et son usine de ciment. Depuis longtemps, les Vaudois se sont habitués à cette dualité: nature et activité humaine. L’être humain a besoin d’arbres et de prés, mais aussi de murs et de ponts. Le Mormont remplit ces deux fonctions, et il appartient à l’Etat de veiller à l’équilibre, en évitant que l’une n’écrase l’autre.

Hélas, nous vivons aujourd’hui dans une société idéologique et manichéenne, qui n’aime plus les équilibres et préfère entretenir de vertueuses luttes entre les contraires: la nature, c’est le Bien; l’activité humaine, c’est le Mal. Depuis plusieurs années, des mouvements écologistes se mettent en scène de manière théâtrale pour «sauver le Mormont». Après avoir tenté le coup de force et l’occupation illégale des lieux, ils ont fait aboutir une initiative populaire «Sauvons le Mormont». Face à un contre-projet conçu pour satisfaire l’essentiel de leurs revendications, ils ont décidé, contre toute attente, de jouer la carte du jusqu’au-boutisme et de maintenir leur texte. Nous votons le 28 septembre sur cette initiative et sur le contre-projet gouvernemental.

L’initiative exige d’interdire purement et simplement toute exploitation du sol sur la colline. Elle vise directement la carrière et la fabrique de ciment, qui jouent depuis près d’un quart de siècle un rôle important et officiellement reconnu pour les activités de construction en Suisse romande. Les auteurs de l’initiative condamnent la production du béton et ses effets sur l’environnement et le climat.

Les producteurs de béton, eux, connaissent le contexte de leur activité et les craintes d’une partie de la population. Ils déploient d’importants efforts pour récupérer la chaleur des fours et pour recycler du béton issu de démolitions. Parallèlement, ils font valoir que les matériaux qu’ils produisent sont nécessaire à la construction de logements, mais aussi d’autres infrastructures. Si l’on ferme la cimenterie d’Eclépens, il n’y aura pas moins de béton en Suisse, mais seulement plus de camions pour l’apporter de l’étranger. Les milliers de tonnes de déchets valorisés à longueur d’année devraient être évacués ailleurs.

L’éditorial de La Nation du 18 avril dernier évoquait ce sujet et en appelait à une attitude responsable: nous avons besoin de ciment et de béton, nous les produisons chez nous et pas chez les autres. Le Mormont doit ainsi rester un lieu dédié à la fois à la nature et à l’activité humaine, et l’initiative écologiste, qui demande la sanctuarisation de la colline, doit être refusée.

Le contre-projet, sur lequel nous devons aussi nous prononcer, propose d’ancrer dans la Constitution vaudoise que l’Etat et les communes créent des conditions favorables au développement de l’économie circulaire et à l’utilisation de matériaux respectueux de l’environnement. A quoi bon inscrire cette profession de foi dans notre loi fondamentale, alors que le secteur de la construction se focalise déjà en ce moment sur maints projets de «durabilité» et de «circularité»? Le seul effet sera d’ouvrir la porte à un nouvel activisme étatique, à une nouvelle bureaucratie chargée de piloter les activités de construction. Si l’on veut faire preuve de prudence et maintenir l’administration à sa juste place, un refus s’impose – ce qui n’empêche pas de considérer que le contre-projet reste préférable à l’initiative (question subsidiaire au cas où les deux objets atteindraient la majorité).

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